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MESURE POUR MESURE.

le duc.

Approchez, Isabelle. — Votre confesseur est maintenant votre prince. L’homme qui était naguère — si zélé et si fervent pour vos intérêts, — n’a pas changé de cœur comme d’habit ; je suis toujours — votre défenseur dévoué.

isabelle.

Oh ! pardonnez-moi, — à moi, votre vassale, d’avoir usé et abusé — de votre auguste incognito.

le duc.

Vous êtes pardonnée, Isabelle ; — et maintenant, chère fille, soyez aussi indulgente pour nous. — La mort de votre frère, je le sais, pèse à votre cœur ; — et vous vous demandez peut-être avec surprise pourquoi je suis resté dans mon obscurité, — moi qui travaillais à lui sauver la vie, et pourquoi — je n’ai pas fait un brusque déploiement de ma puissance cachée, — plutôt que de le laisser périr ainsi. Ô généreuse fille, — c’est la rapidité de son exécution, — que je croyais moins imminente, — qui a paralysé mon projet. Mais, la paix soit avec lui ! — La vie qui n’a plus à s’effrayer de la mort est une vie meilleure — que celle qui se passe à s’en effrayer. Consolez-vous à l’idée — que votre frère est heureux.

isabelle.

Oui, monseigneur.


Rentrent Angelo, Marianne, frère Pierre et le prévôt.
le duc.

— Quant à ce nouveau marié qui s’approche, — et dont l’impudique caprice a outragé — votre honneur si bien défendu, vous devez lui pardonner — en faveur de Marianne. Mais puisqu’il a condamné votre frère, — puisque, doublement criminel, il a violé — la chasteté sacrée et rompu la promesse — qu’il avait faite de sauver votre frère, — la