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SCÈNE XVI.

SCÈNE XVI.
[Une place devant la maison d’Olivia.]
Entrent Sébastien et Feste.
feste.

Voulez-vous me faire accroire qu’on ne m’a pas envoyé vous chercher ?

sébastien.

Allons, allons, tu es un fou. Débarrasse-moi de toi.

feste.

Bien soutenu, ma foi ! Non, je ne vous connais pas, et je ne vous suis pas envoyé par madame pour vous dire de venir lui parler ! Votre nom n’est pas monsieur Césario, et ceci non plus n’est pas mon nez ! Rien de ce qui est n’est.

sébastien.

Je t’en prie, va éventer ailleurs ta folie. Tu ne me connais pas.

feste.

Éventer ma folie ! Il a entendu dire ce mot-là à quelque grand personnage, et maintenant il l’applique à un fou. Éventer ma folie ! J’ai bien peur que ce grand badaud, le monde, ne soit qu’un gobe-mouches… Voyons, je t’en prie, dessangle ton étrangeté, et dis-moi ce que je dois éventer à madame : lui éventerai-je que tu viens ?

sébastien.

— Je t’en prie, béotien stupide, laisse-moi : — voici de l’argent pour toi… Si vous restez plus longtemps, — je paierai en monnaie moins agréable.

feste.

Ma foi, tu as une main libérale. Ces sages, qui donnent de l’argent aux fous, s’assurent une bonne réputation pour un bail de quatorze ans.