Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/121

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JULIETTE. — Ce souhait pourra être bon, Messire, lorsque je serai mariée.

PARIS. — Et il pourra être bon, et il sera bon, jeudi prochain, ma bien-aimée.

JULIETTE. — Ce qui doit être sera.

LE FRÈRE LAURENT. — C’est un texte certain.

PARIS. — Êtes-vous venue pour vous confesser à ce père ?

JULIETTE. — Répondre à votre question serait me confesser à vous ?

PARIS. — Ne lui niez pas que vous m’aimez.

JULIETTE. — Je vous confesserai à vous que je l’aime.

PARIS. — Et vous confesserez aussi que vous m’aimez, j’en suis sûr.

JULIETTE. — Si je fais cela, cette confession aura plus grand prix faite derrière vous qu’en face.

PARIS. — Pauvre âme, tes larmes ont fort outragé ton visage.

JULIETTE. — Les larmes ont’gagné par là une petite victoire, car il était assez laid déjà avant leur malice.

PARIS. — Tu l’outrages plus encore que ne font les larmes par ce jugement.

JULIETTE. — Ce qui est la vérité n’est pas une calomnie, Messire ; et ce que j’ai dit, je l’ai dit à ma face.

PARIS. — Ta face est à moi, et tu l’as calomniée.

JULIETTE. — Cela peut bien être, car en effet elle ne m’appartient pas. — Êtes-Vous de loisir maintenant, mon révérend père, ou reviendrai-je vous trouver à l’office du soir1?

LE FRÈRE LAURENT. — Je suis de loisir en ce moment, ma mélancolique fille. — Monseigneur, nous aurions besoin d’être seuls.

PARIS. — Dieu défende que je trouble la dévotion ! — Juliette, jeudi, de bon matin, j’irai vous réveiller. Jusqu’à ce moment, adieu, et gardez ce respectueux baiser. (Il sort.)

JULIETTE. — Oh ! ferme, la porte, et quand tu l’auras