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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/241

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ment, « c’est ainsi », on ait trouvé que les choses étaient autrement ?

LE ROI. — Non pas que je sache.

POLONIUS, montrant sa tête et ses épaules. — Enlevez ceci de là-dessus, s’il en est autrement : quand je suis guidé par les circonstances, je trouverais la vérité, quand bien même elle serait cachée au centre de la terre.

LE ROI. — Comment pourrions-nous pénétrer plus avant dans l’affaire ?

POLONIUS. — Vous savez que quelquefois il se promène quatre heures de suite, là, dans la galerie.

LA REINE. — C’est ce qu’il fait effectivement.

POLONIUS. — À un de ces moments, je lui lâcherai ma fille : tenons-nous alors derrière une tapisserie, vous et moi ; observons l’entrevue. S’il ne l’aime pas, et s’il n’a pas perdu la raison par suite de cet amour, que je ne sois plus un conseiller de l’état, mais qu’on m’envoie tenir une ferme et diriger des charretiers.

LE ROI. — Nous ferons cette expérience.

LA REINE. — Mais voyez, voici le pauvre malheureux qui vient en lisant, avec une attention sérieuse.

POLONIUS. — Retirez-vous, je vous en conjure ; retirez-vous tous les deux ; je vais l’aborder immédiatement : — Oh, accordez-moi cette liberté. (Sortent le roi, la reine et les assistants.)

Entre HAMLET, lisant.

POLONIUS. — Comment va mon bon Seigneur Hamlet ?

HAMLET. — Bien, Dieu merci.

POLONIUS. — Me connaissez-vous, Monseigneur ?

HAMLET. — Parfaitement, parfaitement bien ; vous êtes un vendeur de poissons.

POLONIUS. — Moi, Monseigneur ? non.

HAMLET. — Alors je voudrais que vous fussiez un aussi honnête homme.

POLONIUS. — Honnête, Monseigneur !

HAMLET. — Oui, Monsieur ; être honnête, au train de ce monde, équivaut à être un homme trié sur dix, mille.