BAPTISTA :
Que la terre refuse de me nourrir, et le ciel de m’éclairer !
Que le jour me refuse récréation, que la nuit me refuse repos !
Que ma confiance et mon espérance se changent en désespoir !
Que le régime d’un anachorète dans sa cellule soit mon seul avenir !
Que toutes les influences qui altèrent le visage de la joie,
Heurtent mes plus chers désirs et les détruisent !
Qu’ici-bas et par delà ce monde, un éternel châtiment me poursuive,
Si, une fois veuve, je redeviens jamais épouse.
HAMLET, à Ophélia. — Et si elle violait ses sermenis à cette heure !
GONZAGO :
Voilà qui est solennellement jurer. Chérie, quitte-moi un instant,
Mes esprits s’alourdissent, et volontiers je tromperais Le jour fatigant par le sommeil. (Il s’endort.)
BAPTISTA :
Que le sommeil berce ton âme,
Et que jamais le malheur ne se glisse entre nous deux !
(Elle sort.)
HAMLET. — Madame, comment trouvez-vous cette pièce ?
LA REINE. — La Dame fait, me semble-t-il, beaucoup trop de protestations.
HAMLET. — Oh, mais elle tiendra sa parole.
LE ROI. — Avez-vous suivi l’argument de la pièce ? Est-ce qu’il n’y a pas de crime là dedans ?
HAMLET. — Non, non, ils ne font que plaisanter ; on empoisonne pour plaisanter. Il n’y a pas là le moindre crime.