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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/298

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Qui descendirent au tombeau

Mouillées des larmes du sincère amour.

LE ROI. — Comment allez-vous, gentille Dame ?

OPHÉLIA. — Bien, Dieu vous le rende ! On dit que la chouette était la fille d’un boulanger [4]. Seigneur, nous savons ce que nous sommes, mais nous ne savons pas ce que nous pouvons devenir. Dieu soit à votre table !

LE ROI. — C’est la pensée de son père qui l’égare.

OPHÉLIA. — Je vous en prie, n’en parlons plus ; mais si on vous demande ce que cela signifie, répondez ceci (elle chante) :

Aujourd’hui est le jour de la Saint-Valentin ;
Tous sont levés de bon matin,
Et moi, jeune fille, me voici à votre fenêtre,
Pour être votre Valentine [5].
Alors il se leva, et s’habilla,
Et ouvrit la porte de la chambre ;
Fille elle y entra, mais fille encore
Elle n’en sortit plus.

LE ROI. — Gentille Ophélia !

OPHÉLIA. — Bien vrai, là, je vais finir ça, sans faire de serment (elle chante) :

Inri et sainte charité,
Quelle honte cela est, hélas !
Les jeunes gens feront cela s’ils en trouvent l’occasion ;
Par le coq ils sont à blâmer.
Ah, dit-elle, avant de me mettre dessous,
Vous m’aviez promis de m’épouser.
Et c’est ce que j’aurais fait, par ce soleil là-haut,
Si tu n’étais pas entrée dans mon lit.

LE ROI. — Depuis combien de temps est-elle ainsi ?

OPHÉLIA. — J’espère que tout ira bien. Nous devons être patients ; mais je ne puis m’empêcher de pleurer en pensant qu’ils ont dû le mettre dans la froide terre. Mon