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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/412

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d’une réalisation probable, et le seul moyen, vraiment, de fléchir le Maure ? En effet, il est très-aisé de décider à toute honnête sollicitation la bienveillante Desdémona ; elle est de nature aussi généreuse que les libres éléments. Quant à vaincre le Maure, c’est pour elle une tâche aisée, — quand même il s’agirait pour lui de renoncer au baptême, à tous les sceaux et à tous les symboles de la rédemption, car son âme est tellement garrottée dans les liens de son amour, que Desdémona peut à son gré faire, défaire, comme il plaira à son caprice d’agir en Dieu avec sa faible résistance. En quoi suis-je donc un scélérat parce que je conseille à Cassio la ligne de conduite qui le mène directement à son bien ? Divinité de l’enfer ! lorsque, les diables veulent suggérer, les plus noirs péchés, ils les présentent d’abord sous les formes les plus célestes comme je le fais maintenant : car tandis que cet honnête imbécile sollicitera, auprès de Desdémona pour réparer sa fortune, et qu’elle plaidera passionnément sa cause auprès du Maure, moi j’insinuerai dans l’oreille d’Othello ce soupçon empoisonné que c’est par coupable tendresse qu’elle le fait rappeler ; et plus elle s’efforcera de servir Cassio, plus elle détruira son crédit auprès du Maure. Ainsi je là ferai s’engluer dans sa propre vertu, et je tirerai de sa générosité même le filet qui les attrapera tous.

Entre RODERIGO.

IAGO. — Eh bien, quelles nouvelles, Roderigo ?

RODEBIGO. — Je suis ici dans la chasse en question, non connue un lévrier qui poursuit, mais comme un lévrier qui se contente de faire sa partie dans Je concert d’aboiements de la meute. J’ai dépensé presque tout mon argent ; j’ai été ce soir rossé de la belle manière, et je crois que tout le résultat consistera dans l’expérience que je retirerai de mes peines ; et c’est ainsi que sans argent du tout, mais avec un peu plus d’esprit, je m’en retournerai à Venise.

IAGO. — Quelles pauvres gens sont ceux qui manquent de patience ! A-t-on jamais vu blessure se guérir autre-