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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/430

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« Charmante Desdémona, soyons prudents ; cachons nos amours. » Et alors, Seigneur, il saisissait et tordait ma main, criait : « Ô douce créature ! » et puis m’embrassait avec force, comme s’il eût voulu arracher par les racines des baisers qui auraient poussé sur mes lèvres ; puis il a passé sa jambe par-dessus ma cuisse, et a soupiré, et m’a embrassé ; et alors il a crié : « Oh ! maudite soit la destinée qui t’a donnée au Maure ! »

OTHELLO. — Oh monstrueux ! monstrueux !

IAGO. — Mais ce n’était qu’un rêve.

OTHELLO. — Oui, mais qui dénotait une chose précédemment accomplie ; c’est un indice singulièrement probant, quoique ce ne soit qu’un rêve.

IAGO. — Et cela peut aider à augmenter le volume des autres preuves qui paraissent trop minces.

OTHELLO. — Je la mettrai en pièces.

IAGO. — Certes, mais soyez prudent : nous ne voyons pas que rien soit encore fait ; il se peut qu’elle soit honnête encore. Dites-moi seulement ceci, — n’avez-vous jamais vu à la main de votre femme un mouchoir avec un dessin de fraises ?

OTHELLO. — Je lui en ai donné un de ce genre ; ce fut mon premier présent.

IAGO. — Cela, je n’en sais rien, mais j’ai vu un mouchoir de ce genre, — et ce mouchoir je suis sûr qu’il était à votre femme, — dont Cassio se servait aujourd’hui pour s’essuyer la barbe.

OTHELLO. — Si c’est celui-là....

IAGO. — Si c’est celui-là, ou tout autre lui appartenant, cela parle contre elle avec les autres preuves.

OTHELLO. — Oh pourquoi le manant n’a-t-il pas quarante mille existences ? une seule est trop pauvre, trop faible pour ma vengeance ! Maintenant je vois que c’est vrai. — Regarde un peu, Iago ; je souffle vers le ciel tout aaon amour passionné : il est parti !—Lève-toi, noire ventgence, du fond de l’enfer ! Cède à la tyrannie de la haine m couronne et le trône de mon cœur, ô amour ! Gonfle-