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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/431

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toi, mon sein, sous la cargaison que tu portes, car elle est composée de langues d’aspics !

IAGO. — Contenez-vous cependant.

OTHELLO. — Oh du sang, du sang, du sang !

IAGO. — Patience, vous dis-je ; vous changerez peut-être de sentiment.

OTHELLO. — Jamais, Iago. Comme la mer du Pont dont les courants glacés et la course en avant ne connaissent jamais le reflux, mais continuent droit "leur chemin vers la Propontide et l’Hellespont [9] ; ainsi mes pensées sanguinaires, emportées d’Un pas violent, ne retourneront jamais en arrière, ne reflueront jamais vers Thumble amour, jusqu’à ce qu’elles se soient englouties dans une vengeance immense proportionnée à l’offense. — À cette heure, par ce ciel, de marbre là-bas, j’engage ma promessepour l’exécution religieuse d’un serment sacré. (Il s’agenouille.)

IAGO. — Ne vous relevez pas encore. (Il s’agenouille.) Soyez témoins, ô vous, lumières éternellement brûlantes en haut, et vous, éléments qui nous enveloppez de toutes parts, soyez témoins qu’ici Iago met au service d’Othello outragé les armes de son esprit, de ses mains, de son cœur ! Qu’il commande, et quelque sanglante que soit l’œuvre, obéir sera pour moi acte de compatissante bonté !

OTHELLO. — J’accueille ton affection, non avec de vains remerciments, mais en l’acceptant de plein cœur, et je veux immédiatement la mettre à l’épreuve : d’ici à trois jours, apprends-moi que Cassio ne vit plus.

IAGO. — Mon ami est mort : c’est chose faite à votre requête ; mais qu’elle vive.

OTHELLO. — Qu’elle soit damnée, la perfide catin ! qu’elle soit damnée ! Allons, viens avec moi en un lieu à l’écart ; je vais me retirer afin de chercher des moyens de mort rapide pour la belle diablesse. Maintenant, tu es mon lieutenant.

IAGO. — Je suis à vous pour toujours. (Ils sortent)