Page:Siefert - Rayons perdus.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Sondant imprudemment ce que Dieu vous dispense,
On veut que tout travail porte sa récompense
Et tout arbre son fruit.
On repousse un devoir humble, austère ou stérile,
Et cette paix factice à la fin vous exile
De ce monde de bruit.

On meurt en peu de temps lorsqu’on vit cette vie ;
Cette ivresse d’esprit du sommeil est suivie.
On s’éveille au tombeau.
Plus charmeresse encor que la mélancolie,
Comme un souffle léger cette douce folie
Éteint votre flambeau.

Si jamais âme humaine a goûté ce vertige,
Et, semblable à la fleur arrachée à sa tige
Que soulève le vent,
Si jamais un esprit a délaissé la terre,
Ce fut moi, dans les jours où j’aimais à me taire
Pour m’en aller rêvant.

Que de fois je mentis à ma propre souffrance,
Alors que s’élançait au loin mon espérance
Fraîche & riante encor !