Page:Sienkiewicz - Quo vadis, 1983.djvu/355

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afin que les multitudes pussent contempler la mort du Fils de l’Homme.

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Et je les ai vus qui perçaient son flanc, et lui, je l’ai vu mourir.

Et, au retour du crucifiement, moi aussi je criais dans ma douleur : « Hélas ! hélas ! Seigneur, Tu es Dieu ! Pourquoi avoir souffert cela, pourquoi être mort, et pourquoi avoir désespéré notre cœur, à nous qui avions foi dans la venue de ton règne ? ».

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Mais Dieu, notre Seigneur et notre Maître, ressuscita le troisième jour, et il resta parmi nous jusqu’au moment où, dans une clarté infinie, il entra dans son royaume…

Et, comprenant notre peu de foi, nous nous sommes raffermis dans nos cœurs, et depuis ce jour nous semons la semence divine. »

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Il se tourna vers celle qui la première avait proféré sa plainte et continua d’une voix plus forte :

— Pourquoi vous plaignez-vous ?… Dieu lui-même s’est soumis à la torture et à la mort, et vous voulez qu’il vous en défende ? Hommes de peu de foi, avez-vous compris Ses paroles ? Vous a-t-il donc promis uniquement cette vie terrestre ? Voici qu’il s’approche et vous dit : « Suivez ma route. » Voici qu’il vous élève vers Lui ! Et des deux mains vous vous cramponnez à cette terre en criant : « Au secours, Seigneur ! » Je ne suis devant Dieu que poussière, mais devant vous je suis son Apôtre et son Vicaire, et je vous le déclare au nom du Christ : Non ! ce qui est devant vous ce n’est pas la mort, mais la vie ; ce ne sont pas des larmes ni des gémissements, mais l’allégresse ; ce n’est pas la douleur, mais l’inaltérable joie ; ce n’est pas l’esclavage, mais la royauté ! Moi, Apôtre de Dieu, je te le dis, ô veuve, ton fils ne mourra point, mais il naîtra dans la gloire pour la vie éternelle, et tu le retrouveras ! À toi, père, dont les bourreaux ont souillé la vierge, je te promets que tu la retrouveras plus blanche que les lis d’Hébron ! À vous tous, qui verrez mourir ceux que vous chérissez, à vous les accablés, les infortunés, les terrifiés, et à vous qui allez mourir, je vous dis au nom du Christ que vous passerez ainsi que du sommeil à un réveil de bonheur, et de la nuit à l’aurore de Dieu. Au nom du Christ, que tombent de vos yeux les écailles et que s’enflamment vos cœurs !

Il leva la main comme pour donner un ordre. Et ils sentirent un sang nouveau dans leurs veines et un frisson dans tout leur corps. Car devant eux se dressait non plus un vieillard courbé et accablé, mais un homme puissant qui relevait leurs âmes de la poussière et de l’anxiété.