Page:Sienkiewicz - Quo vadis, 1983.djvu/410

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que le souffle haletant des poitrines oppressées et, çà et là, encore un murmure de prières.

Vinicius pénétra dans un deuxième caveau, plus petit que les précédents, et leva sa lanterne.

Soudain, il tressaillit ; il lui avait semblé apercevoir, sous les barreaux d’un soupirail, la gigantesque silhouette d’Ursus. Il souffla aussitôt son lumignon et s’approcha :

— Est-ce toi, Ursus ?

Le géant tourna la tête.

— Qui es-tu ?

— Ne me reconnais-tu pas ? — dit le jeune homme.

— Tu as éteint la lumière, comment veux-tu que je te reconnaisse ?

Mais Vinicius, apercevant Lygie couchée sur un manteau, au pied du mur, vint, sans dire un mot, s’agenouiller auprès d’elle.

Alors Ursus le reconnut et lui dit :

— Béni soit le Christ ! Mais ne l’éveille pas, seigneur.

Vinicius, à genoux, la contemplait à travers ses larmes. Malgré l’obscurité, il pouvait distinguer son visage, pâle comme de l’albâtre, et ses épaules amaigries. À cette vue, il ressentit un amour pareil à la plus déchirante douleur, un amour plein de pitié, de vénération et de respect. Il se prosterna, la face contre terre, et posa ses lèvres au bord du manteau sur lequel reposait l’être qui lui était si cher.

Ursus, silencieux, le regarda longtemps ; enfin, le tirant par sa tunique :

— Seigneur, — demanda-t-il, — comment es-tu entré ? Viens-tu pour la sauver ?

Vinicius, incapable de maîtriser son émotion, se releva :

— Indique-moi un moyen, — dit-il enfin.

— Je croyais que tu l’aurais trouvé, seigneur. Moi, il ne m’en est venu qu’un à l’idée…

Il tourna les yeux vers les barreaux ; puis, comme se répondant à lui-même, il dit :

— Oui !… Mais, derrière, il y a des soldats !…

— Cent prétoriens, — confirma Vinicius.

— Alors, nous ne passerions pas ?

— Non !

Le Lygien se frotta le front et demanda de nouveau :

— Comment es-tu entré ?

— J’ai une tessera du gardien des Fosses Puantes…

Tout à coup il s’interrompit ; une pensée lui était venue :

— Par le supplice du Sauveur ! — s’écria-t-il, — je resterai ici ; qu’elle prenne ma tessera, qu’elle s’enveloppe la tête de ce linge, qu’elle mette mon manteau et qu’elle sorte. Il y a quelques jeunes