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APPORT DES NÉO-IMPRESSIONNISTES

communauté du procédé, dira tel visiteur d’expositions.

Celui-là sans doute s’est entraîné dès longtemps à ne distinguer les œuvres des peintres que le catalogue à la main. Il faut, en effet, être bien réfractaire aux jeux de la couleur et bien insensible aux charmes de l’harmonie pour confondre un Seurat, blond, fin, aux couleurs locales atténuées par la lumière et par l’ombre, avec un Cross, dont les localités éclatent, dominatrices des autres éléments.

À des enfants ou à des êtres primitifs, montrez des enluminures d’Épinal et des estampes japonaises : ils ne les distingueront pas les unes des autres. Mais des gens dont l’éducation artistique sera ébauchée discerneront déjà la différence de ces deux sortes d’images. Et d’autres, plus instruits, sauront mettre un nom d’auteur sur chacune des estampes japonaises.

Montrez-leur des peintures de divers néo-impressionnistes : pour la première catégorie, ce seront des tableaux « comme les autres » ; pour la deuxième, ce seront tous des tableaux pointillés indistinctement ; et seulement les adeptes du troisième degré sauront reconnaître la personnalité de chaque peintre.

De même qu’il y a des gens incapables de distinguer un Hok’saï d’un Hiroshighé, un Giotto d’un Orcagna, un Monet d’un Pissarro, il en est qui confondent un Luce avec un Van Rysselberghe. Que ces amateurs parachèvent leur éducation artistique.