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L’ÉCRIN DISPARU

sur un terrain moins personnel. Malgré sa tristesse, monsieur Giraldi avait trop d’usage du monde, pour ne pas soutenir son rôle de Maître de maison. Lédia elle-même retrouva vite sa bonne humeur coutumière. Le repas s’acheva dans une atmosphère moins dépressive, qu’elle ne l’avait été depuis longtemps au Parc des Cyprès.

Pendant qu’au salon ou au fumoir, les conversations continuaient dans une familiarité plus intime, Madeleine organisait un « bridge » et cherchait un quatrième joueur, quand Parizot s’offrit de bonne grâce, aidant à apporter la table de jeu. Il y avait déjà longtemps que l’on n’avait plus touché de cartes à la résidence du Maître et cela fit impression d’en revoir ; les paquets étant disposés sur le tapis vert, les joueurs se groupèrent, tandis que d’autres cherchèrent, soit dans une tournée de yacht, soit dans les instruments de musique, un délassement en rapport avec leurs goûts.

Sur le grand piano à queue du salon, un cahier de musique portait en suscription :

« À mon bien-aimé fils Jean, pour le quinzième anniversaire de sa naissance. »

De son Père aimant :
Léo GIRALDI.

La simple lecture de cette dédicace, avait causé une profonde impression de mélancolie, réveillant comme la vision de l’absent avec le chant d’une voix lointaine et douce, l’écho de notes naguère vibrantes au piano maintenant muet ; et instinctivement revenait à la mémoire la strophe du poète :

« Le nom bien vite à l’abandon retombe
Sur la mousse choit la fleur sans parfum
La pierre grise à l’aspect de la tombe
Qui recouvre un amour défunt. »


V

EN VISITE.


Madame Clara Walfish revenait de la grand’messe à Pointe à Fortune, où sa fille avait chanté de sa voix fraîche et bien timbrée un O Salutaris de Gounod. Celle-ci achevait à peine de remercier pour tous les compliments qui l’avaient assiégée à la porte de l’église, lorsque brusquement elle s’interrompit :