Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/116

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l’usage de la polygamie qu’il a trouvé existant chez le peuple hébreu, c’est que lui et son frère Aaron, s’astreignirent à faire tout de suite exception à cet usage. Ils étaient tous deux trop initiés à la pensée divine qui avait présidé à la rédaction de la loi sinaïque où la première parole prononcée relativement au mariage, consacre évidemment la monogamie[1], pour avoir pu se méprendre sur la portée de cette faculté laissée aux Hébreux de leur temps de réunir sous le même toit plus d’une épouse légitime. Ce qu’ils savaient être une concession forcée pour les autres, ils jugeaient prudent et vertueux de n’en pas profiter pour leur propre compte. Ce n’est certes pas Mahomet qui eût fait preuve d’autant de sagesse, de vertu, et, disons le mot, de continence. Il a cru pouvoir donner un exemple diamétralement opposé à celui de Moïse. Jésus, lui, s’il avait eu une tendance pour le mariage n’eût pas agi de la sorte. Il était pour cela trop pénétré du véritable esprit de la Bible. D’ailleurs, ce qui prouve que, de son temps, la polygamie n’existait pas dans la Judée, c’est qu’il n’a pas pour elle une seule parole de réprobation. Et comme il l’aurait solennellement condamnée chez ces pharisiens qu’il aimait si peu, si quelques-uns d’entre eux l’avaient pratiquée !

Ce qui atteste encore que, dès le début, tout en concédant la polygamie, Moïse cherchait déjà à lui creuser une tombe, ainsi que nous l’avons vu faire pour l’esclavage, c’est ce principe posé par lui et déclarant parfaitement égales entre elles toutes les femmes unies à un même mari. Que ces femmes soient esclaves ou libres, dès que le mari se les est attachées, il se doit également à elles toutes. Aucune préférence ne peut être faite. Toutes ont les mêmes droits à l’amour, au respect, et jusqu’à la muni-

  1. Genèse, chap. II, v. 24.