Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/117

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ficence pécuniaire de leur époux commun[1]. Or, on l’a observé avec raison[2] : chez un peuple cultivateur dont toute la richesse consistait dans les produits du sol, de semblables prescriptions devaient nécessairement avoir pour effet de supprimer la polygamie. Et de fait, l’histoire sacrée enregistre un cas qui vient à l’appui de cette remarque : c’est un parent d’Elimélech refusant d’épouser Ruth pour ne pas morceler son bien[3]. Et Moïse lui-même parle d’un mari qui épouse deux femmes comme d’une chose rare et presque exceptionnelle : « s’il arrive qu’un homme prend deux femmes[4] ! » En général, le grand législateur envisage toujours la maison conjugale comme étant composée des deux époux seulement : « Toi, ta femme[5]. » Ce sont là ses expressions favorites, et quand, il y a aujourd’hui un peu plus de sept siècles, le rabbin Gerson de Mayence, dans un synode tenu à Worms, a formulé et fait arrêter un décret d’excommunication[6] contre tout Israélite bigame, c’est qu’il était assuré que la décision prise aurait universellement force de loi, parce que chacun en Israël verrait en elle le dernier mot de la Bible, et comme le terme où devait venir forcément aboutir une concession due simplement aux mœurs des temps primitifs.

Nous ne parlerons pas sur le même ton de restriction, du divorce et de la répudiation. Ce n’est plus une question de savoir si le divorce ne demeure pas le meilleur remède contre ces unions disparates ou malsaines, telles qu’on en voit souvent se nouer par pur intérêt. C’est assurément une des plus grandes plaies que l’indissolubilité forcée d’un mariage où les deux

  1. Exode, chap. XXI. v. 10.
  2. Munk, Palestine, p. 203, et Franck Adolphe dans ses Études orientales.
  3. Ruth, chap. IV, v. 6.
  4. Deut., XXI, v. 15.
  5. Comparez Ex., chap. XXI, v. 3 : Nombres chap. II, v, 17 ; Deut., chap. V, v. 21, chap. XXII, v. 7, XX, v. 7, XXV, v. 5, avec les chap. XXI. v. 15 et XXIV v. du même 5e livre de Moise.
  6. Eben Hadzer, chap. 1, § 9.