Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/223

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plus tard, quelques rabbins ont cru devoir exercer leur imagination sur les sombres fictions d’une mythologie infernale, il a cependant toujours suffi du silence gardé par le Pentateuque pour arrêter à temps les uns et les autres, et les empêcher d’aller aux résultats extrêmes où peut conduire la foi aux démons. Ainsi, il est vrai, Satan a fini par conquérir sa place dans quelques-uns des livres des Saintes Écritures. Mais ce Satan est-il bien le même que l’ange rebelle envers Dieu, qui nous est représenté dans le Christianisme et le Mahométisme sous les traits d’un géant ayant porté la guerre dans les cieux ?… Nullement. La doctrine juive le déclare semblable à tous les autres êtres célestes qui sont soumis aux ordres de Dieu, et vont humblement solliciter de lui la permission de toucher à tel ou tel mortel pour le mettre à l’épreuve[1]. Qu’on veuille bien remarquer cette différence. Elle ne va à rien moins qu’à écarter jusqu’à la dernière nuance du dualisme, cette grande erreur venue de l’Extrême-Orient sur la lutte éternelle entre l’esprit du bien et l’esprit du mal.

Il est encore vrai que les démons, avec l’empire qu’ils exercent sur la terre et dans l’enfer, ont trouvé, à de certaines époques, créance dans la Synagogue. Mais ce n’a été que sous la condition de se donner, non pour un produit biblique, mais pour une importation venue du dehors dans le Judaïsme, pour une création exotique ne se rattachant aux Saintes Écritures par aucun fil.

Ici encore la différence est sensible. C’est à titre de pure superstition que la démonologie avait, pour un instant, pris pied dans la société juive, tandis que dans les sociétés chrétienne et musulmane elle règne encore aujourd’hui comme un article de foi, possédant la consécration de paroles claires et positives prononcées en sa faveur par les fondateurs des deux nouvelles doctrines. Jésus et Mahomet croient aux maladies de possession,

  1. Job, chap. I et II.