Bien différente est la crainte du juste. Ne traînant après elle ni agitation, ni inquiétude, elle répand dans son âme une sérénité calme et rafraîchissante, le soutient dans l’adversité et l’arme d’une forte résignation[1]. Soutenu par elle, il respire plus à l’aise dans le plus profond malheur ; il le supporte mieux, ce malheur, il s’en console plus aisément. Pourquoi ? parce que sa crainte est chez lui le résultat de sa méditation sur la grandeur de Dieu d’un côté, sur la faiblesse de l’homme et sur la fragilité de son existence de l’autre. Et cette crainte est précisément celle dont la Bible et le Talmud s’accordent à faire le principe de toute science et de toute sagesse[2]. Il faut voir comme ils ont largement compris l’intime liaison qui existe entre la science humaine et la crainte de Dieu ! Qui ne sait, en effet, que les rapports entre ces dernières sont tels que la science demeure stérile si elle n’est fécondée par la crainte du Seigneur. Prenez telle science que vous voulez, philosophique, religieuse, mathématique, littéraire même, si la pensée de Dieu ne préside pas à leur acquisition ou à leur diffusion par l’enseignement, elles ne sont toutes que des statues découronnées. Ce qui fait leur prix réel, c’est autant la sainteté qu’elles répandent dans l’âme, que les lumières qu’elles versent dans l’esprit. Clarté et développement de l’intelligence, ennoblissement et sanctification du sentiment ; c’est là leur double objet, et qui dit les uns sans les autres n’entrevoit que sous un demi-jour les bienfaits de la science.
Elles ne poursuivent qu’un seul but, de ramener tout à une loi générale, c’est-à-dire finalement à Dieu.
Que sera-ce encore si nous montrions l’influence de la crainte