Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/276

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Dieu[1]. » C’est ce qu’affirment les docteurs juifs dans leur langage figuré. Quelle image expressive des graves désordres que le parjure amène à sa suite ! Car si le serment perd son caractère sacré, c’en est fait de la justice ; son action est paralysée ; ses moyens de répression affaiblis, presque anéantis. Le frère s’arme contre le frère ; l’insatiable cupidité n’a plus de frein, l’ambition plus d’obstacle qui l’arrête ; la colère peut exercer ses vengeances et la jalousie tramer ses complots dans les ténèbres ; le règne de l’honnêteté est fini, celui du brigandage commence, et bientôt, selon la parole du prophète, « la terre elle-même s’attriste de la dévastation dont elle se voit être le théâtre, et tous ses habitants prennent le deuil[2]. »

C’est ainsi que la doctrine israélite, non contente d’avoir admirablement caractérisé la crainte de Dieu, a encore tenu à en faire sortir une des conséquences les plus immédiates, afin de montrer qu’elle n’est point une terre stérile. Règles générales et applications particulières, elle a tout successivement déterminé, pour qu’on se convainquit qu’elle a su rendre productif le champ de la morale. Principes et pratiques, elle a légué le tout dans un état florissant aux religions venues après elle.

§ II
L’AMOUR DE DIEU

« On peut aimer Dieu, dit un célèbre moraliste juif, ou parce qu’il nous comble chaque jour de bienfaits, ou parce qu’il nous pardonne nos fautes, ou enfin parce que l’idée que nous avons de sa grandeur infinie, nous attire vers lui et lui gagne toute notre affection[3]. » Il n’est pas besoin de réfléchir

  1. Pirke Aboth, chap. V.
  2. Osée, chap. IV. v. 2 et 3.
  3. Bachya, Devoirs du cœur, chap. II du Traité de l’amour de Dieu.