Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/277

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longuement pour se convaincre que le véritable amour de Dieu est celui qui se manifeste en nous, lorsque nous sommes arrivés à connaître, à saisir clairement toutes les perfections qui distinguent le Créateur. Alors nous comprenons que ce n’est pas par reconnaissance que nous devons l’aimer ; mais parce qu’il est le bien supérieur à tout ce qui dans ce monde mérite le plus notre attachement. Et cet amour tout à fait désintéressé ne laisse pas que d’être un sentiment très naturel. N’est-il pas constant, en effet, que nous sommes portés naturellement à aimer tout ce qui possède quelques-uns des caractères de la beauté idéale que conçoit notre raison ? Un site pittoresque, un charmant paysage, une figure régulièrement belle, un tableau d’art, tout cela nous ravit, nous transporte, nous attache irrésistiblement. Telle est l’intimité des rapports qui existent entre la raison et le sentiment que ce que l’un admire, l’autre l’aime.

Il en est de même des belles actions, des actions de dévouement et d’héroïsme qui s’accomplissent sous nos yeux, ou dont nous écoutons le récit merveilleux. Elles nous frappent ; nous en sommes touchés et nous accordons à celui qui en a donné l’exemple non seulement notre estime, mais encore notre amour. Cet amour est-il le fruit d’un calcul ? Est-il dicté par un sentiment d’égoïsme ? Ne le donnons-nous pas spontanément et sans avoir fait le moindre retour sur nous-mêmes ? Or, si nous aimons d’un amour si désintéressé ce qui est beau dans le monde physique, quel autre caractère que celui du désintéressement le plus absolu ne doit pas posséder notre amour pour Dieu ? Dieu n’est-il pas le principe de tout ce qu’il y a de beau dans le monde ? N’en est-il pas l’idéal ? Et comme il est l’idéal, le type du beau, il l’est aussi du vrai et du bien. « Dans quel lieu du globe, dit l’Écriture, le sage ira-t-il creuser la sagesse ? Ni la mer, ni l’abîme ne la recèlent dans leur sein. Elle demeure avec Dieu