Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/292

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et reviens, car que ne t’accorderais-je en semblable circonstance[1] ? »

Un amour de Dieu exagéré, voilà donc en somme ce qu’enseigne le Christianisme. Ce n’est pas cela que nous avons à craindre du Mahométisme. Mettant tout le bonheur de l’homme dans des jouissances maté elles, aussi bien dans ce monde que dans l’autre et par conséquent ne lui inspirant que des aspirations purement terrestres, la religion Mahométane est-elle seulement capable de comprendre ce que c’est que d’aimer Dieu ? Nous avons vainement cherché dans le Coran un chapitre ou Sourat qui porte en tête le titre : Amour de Dieu. Pour le musulman, il se place toujours, entre le Ciel et lui, l’image d’un plaisir des sens qui obscurcit à la fois la vue de son esprit et les sentiments de son cœur. Comme tantôt on craignait Dieu à cause des châtiments corporels, de même on l’aime à cause des récompenses de pareille nature qu’on espère recevoir de lui. Il y a ici exagération dans le sens inverse de celle que nous avons constatée chez le Christianisme[2]. La vérité est dans la religion juive qui tient la flèche de la balance à égale distance des plateaux, qui pondère l’amour de Dieu par les affections terrestres et empêche ces dernières de s’exagérer en leur opposant constamment l’amour de Dieu.

§ III
LE CULTE PUBLIC

A côté de la crainte et de l’amour de Dieu se place un troisième devoir, celui de servir Dieu. Servir Dieu, c’est après avoir reconnu intérieurement et s’être convaincu par l’observation

  1. 1er Rois, chap. XIX, v. 21.
  2. Toutefois, au cinquième siècle de l’hégire, une secte ascétique tenta de se former aussi parmi les Musulmans sous le nom de soufisme. Son fondateur fut Sidi Abd-el-Kader el Djilani. Mais cette secte n’avait et n’a encore rien de religieux. Le soufisme est une simple manière de vivre. Il ne s’apprend pas de tel ou tel religieux. Il n’est ni musulman, ni chrétien, ni juif.