qui se mirent à répondre tous deux à la fois : Moi, Sire, qui suis aveugle je n’ai pu remarquer ces fruits, moi qui suis paralysé, je n’ai pu aller les prendre. Le roi comprit de suite, et les ayant fait monter l’un sur l’autre, il les châtia exemplairement. »
Cet ingénieux apologue montre bien ce qu’est pour le Judaïsme le corps à l’égard de l’âme. Et pour achever d’établir combien le Judaïsme défend de faire au corps une guerre d’extermination par des jeûnes trop souvent répétés, que l’on nous permette de citer encore la page suivante du Talmud : « Rabbi Samuël enseigne : Celui qui s’astreint à de nombreux jeûnes, commet un grave péché, car il est écrit[1] qu’au huitième jour le Nazir apporte un sacrifice expiatoire pour la faute qu’il a commise envers son âme. » — « Cette faute quelle est-elle ? de s’être interdit le vin. Quelle belle leçon ! Déjà on impute à péché une faible privation que l’on s’impose, que sera-ce donc d’une grande abstinence ? Et Rabbi Siméon explique : Sans doute Dieu prend plaisir à un jeûne de pénitence. Mais encore faut-il que la santé permette de le faire, autrement il constitue un acte coupable. » C’est aussi là l’opinion de Rab Schescheth : « Le savant, dit-il, qui se livre à des jeûnes n’en a aucun mérite. Il y a même plus, répond Rabbi Jérémie au nom de Rabbi Siméon ; c’est enfreindre une défense formelle que de jeûner quand on s’occupe d’études sérieuses ; on s’affaiblit inutilement et le travail devient impossible[2]. »
Est-il encore besoin, après cela, de parler de l’horreur qu’inspirent à la doctrine israélite ces flagellations et ces macérations tant prônées par les âmes mystiques, qui cherchaient à ruiner leur corps déjà exténué par toutes sortes de coupables austérités,