Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/445

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« O non Dieu ! s’écrie David, me suis-je jamais vengé de ceux qui me persécutaient ? Ce sont eux qui m’ont rendu le mal pour le bien, et pourtant, quand ils étaient malades je mettais le cilice, je jeûnais et je faisais à leur intention les plus sincères prières[1]. » « Ne dis pas, s’écrie Salomon, je lui ferai comme il m’a fait ; garde-toi de rendre le mal pour le mal. Dieu ne laisse pas impuni celui qui se réjouit de l’infortune de son ennemi, car, sache-le, si tu éprouvais une semblable joie, si ton cœur ressentait du plaisir de la plus légère faute de ton adversaire, cela déplairait encore aux yeux de l’Éternel[2]. »

Écoutons maintenant les Rabbins quand ils se mettent à commenter les paroles de Moïse relatives aux devoirs envers l’ennemi, et que nous avons déjà eu l’occasion de citer. Il est écrit : « Si tu vois l’âne de ton ennemi tomber sous sa charge, garde-toi bien de te détourner de lui[3]. » D’un autre côté, on lit ceci dans le Pentateuque : Ne demeure pas indifférent devant le bœuf ou l’âne de ton frère qui succombe sur la route. Aide ton frère à le relever[4] » « Ces deux commandements sont placés à dessein l’un avant l’autre, pour enseigner que l’accomplissement d’un devoir envers un ennemi passe avant celui qui regarde un ami, et encore pour apprendre à vaincre le ressentiment[5]. » Quoi de plus délicat que cette interprétation !

Et celle-ci l’est-elle moins ? Il est dit : « Tu ne te vengeras pas et tu ne porteras pas rancune[6]. Qu’est-ce que se venger, et qu’est-ce que porter rancune ? Exemple : quelqu’un veut emprunter la faux de son prochain. Celui-ci lui répond :

  1. Psaumes, chap. VII, v. 4, et chap. XXXV, v. 12 et 13.
  2. Prov., chap. XVII, v. 5., et chap. XXIV. v. 17 et 18.
  3. Ex., chap. XXIII, v. 5.
  4. Deut., chap. XXII.
  5. Talmud, traité Baba Meziah, p. 32.
  6. Lévit., chap. XIX, v. 17 et 18.