Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/57

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pas à l’Évangile et au Coran. Un Dieu particulier, un Dieu national n’est plus un Dieu-esprit, et quelque effort que l’on fasse, on ne parviendra pas à dégager un Dieu local de la matérialité qui lui est inhérente.

Heureusement cet effort n’est point à faire pour ce qui regarde le Dieu proclamé par la Bible, et, en présence du grand nombre de textes dont elle fourmille sur ce point, nous sommes étonné que l’on ait pu se méprendre aussi étrangement sur l’esprit général de presque chacune de ses pages, et que l’on se soit si servilement attaché à la littéralité d’un de ses mots, quand tout en elle parle de l’immensité du Créateur, ainsi que du caractère d’universalité qu’il revêt. Faut-il en réalité plus qu’un peu de bonne foi pour comprendre, dans leur vrai sens, ces termes : Dieu d’Israël ? Est-ce que les Saintes Écritures veulent dire autre chose par là que le Dieu adoré par Israël ? Est-ce que, en employant cette expression, elles ont jamais voulu faire plus que consacrer une locution reçue, en usage dans le monde d’alors ? Au temps où le peuple hébreu reconnut l’Éternel pour Dieu, il fut le seul qui eût fait cette profession de foi. Les autres peuples avaient chacun leur dieu, des divinités particulières qui étaient censées les protéger contre les divinités des autres pays. Aux yeux de ces peuples, le Dieu adoré par Israël n’était ni plus ni moins qu’un Dieu particulier, et, à leur tour, les Hébreux acceptaient cette dénomination parce qu’elle servait très bien à distinguer l’Éternel des dieux étrangers. Mais est-ce à dire que, dans leur opinion, l’Éternel ne possédât pas l’immensité ? Nullement. Pour eux, tout en étant le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, il ne cessait pas d’être le Dieu du Ciel et de la terre[1], le Juge de tout l’univers[2] », le Dieu principe

  1. Expression répandue dans toute la Bible.
  2. Genèse, chap. XVIII, v. 18.