Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/80

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que les autres. C’est dans ce livre que Dieu nous est représenté traçant le cercle immense des cieux au-dessus de l’immense étendue de la terre, fixant et dirigeant le rouage qui le met en mouvement, faisant rouler dans leurs invariables orbites les astres destinés à le tenir en équilibre, lui, qui est suspendu entre eux sans appui, sur le néant, enfin donnant la vie et la mort à tous les êtres répandus sur sa surface[1]. Le poème de Job demeurera le plus majestueux monument que jamais religion ait élevé à la gloire du Dieu-Providence. Il est dans toutes ses parties, du commencement à la fin, un entraînant et superbe plaidoyer où l’on ne se lasse pas de montrer Dieu intervenant avec une incomparable sagesse jusque dans le gouvernement purement mécanique de l’Univers. Et si, au rapport d’une tradition, Moïse est effectivement l’auteur de ce poème admirable, il ne nous étonne plus que tant d’éloquence s’y trouve unie à tant de richesse, de variété et de profondeur dans l’observation des faits de la nature.

Et pourtant, nous l’avons dit le Judaïsme ne veut ni ne peut se flatter d’avoir révélé au monde l’idée de la Providence, en tant qu’elle figure seulement l’Être qui veille à nos besoins quotidiens. Cette idée, on la possédait bien avant que la doctrine juive ne fût formulée ; elle était née chez l’homme avec la première réflexion qu’il avait faite sur l’origine des choses nécessaires à son existence matérielle. La production de ces choses par le hasard ou par l’agrégat de molécules se rencontrant fortuitement, ne fut jamais admise que par des philosophes à l’esprit égaré, ou, pour parler plus convenablement, par des hommes à système. Le bon sens des peuples n’y a jamais cru, et de tout temps, l’on s’est mieux complu dans l’adoration

  1. Job, chapitres XXXVII et XXXVIII.