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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/128

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Les primes à l’exportation pour toute marchandise fabriquée chez nous peuvent être combattues, premièrement, par cette objection générale qu’on peut appliquer à tous les divers expédients du système mercantile, savoir, qu’elles poussent par force quelque partie de l’industrie nationale dans un canal moins avantageux que celui dans lequel elle se serait portée d’elle-même ; et secondement, par cette objection, particulière à la prime, qu’elle pousse par force cette portion d’industrie, non-seulement dans un canal qui est moins avantageux, mais même désavantageux pour le moment, puisqu’un commerce qui ne peut marcher qu’à l’aide d’une prime est nécessairement un commerce à perte. Mais la prime pour l’exportation du blé est susceptible encore d’une autre objection, c’est qu’elle ne peut augmenter en rien la production de la denrée dont elle s’est proposé d’encourager la culture. Ainsi, quand nos propriétaires ruraux demandèrent l’établissement de la prime, s’ils agirent à l’imitation de nos marchands et de nos manufacturiers, ils n’agirent pas cependant avec cette parfaite intelligence de leur propre intérêt qui dirige ordinairement la conduite de ces deux autres classes[1] ; ils grevèrent le revenu public d’une dépense énorme ;

  1. Ils paraissent au contraire avoir parfaitement compris leurs intérêts. Ils virent qu’en envoyant au dehors une partie de l’approvisionnement, ils obtiendraient de meilleurs prix pour la portion restante, et ils ne s’embarrassèrent guère des considérations raffinées dont M. Smith a embrouillé la question. Maintenant que la production intérieure n’est pas suffisante, et que, par conséquent, le pays est devenu dépendant des envois étrangers, aucune prime ne pourrait effectuer une exportation et produire une hausse dans les prix. Les propriétaires de terre, changeant de vues, ont donc imaginé d’interdire l’importation, comme ils avaient autrefois favorisé l’exportation. Dans tout ceci, ils ont prouvé qu’ils avaient assez l’intelligence de leurs propres affaires ; et on peut seulement regretter que, comme législateurs, ils ne se soient pas montrés assez soucieux du bien-être de la communauté, et qu’ayant été témoins de la misère des pauvres par suite du haut prix des céréales, ils aient persisté dans des mesures dont les effets devaient encore augmenter cette misère. On peut regretter que le désir d’augmenter leurs revenus ait prévalu sur toutes les considérations de justice et d’humanité. Buchanan.