Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/137

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l’exportation des marchandises étant encore sous la même forme où elles ont été importées. On l’appelle Prime dès que la marchandise exportée a subi par la main-d’œuvre une modification qui lui a fait changer de dénomination.

Les prix que donne l’État à des artistes ou à des fabricants qui excellent dans leur profession ne sont pas susceptibles des mêmes objections que les primes.

En encourageant un talent ou une dextérité extraordinaire, ils servent à entretenir l’émulation des ouvriers alors employés dans ces mêmes genres d’occupation, et ils ne sont pas assez considérables pour détourner vers un de ces emplois une plus grande portion du capital du pays que celle qui y aurait été d’elle-même. Ils ne tendent pas à renverser l’équilibre naturel entre les divers emplois, mais à rendre aussi fini et aussi parfait que possible le travail qui se fait dans chacun d’eux. D’ailleurs, la dépense des Prix n’est qu’une bagatelle, celle des primes est énorme ; la seule Prime sur le blé a coûté quelquefois à l’État plus de 300,000 livres dans une seule année.

Quelquefois les Primes sont appelées Prix, tout comme les Drawbacks sont quelquefois appelés Primes. Mais il faut toujours s’attacher à la nature de la chose en elle-même, sans s’embarrasser des termes.


DIGRESSION
Sur le commerce des blés et sur les lois y relatives.[1]


Je ne puis terminer ce chapitre sur les primes, sans observer qu’il n’y a rien de moins mérité que les éloges qu’on a donnés à la loi qui établit la prime à l’exportation des blés, et à tout ce système de règlements qui s’y trouve lié. Pour démontrer la vérité de mon assertion, il ne faut

  1. Il y a peu de sujets qui aient donné naissance à une controverse plus vive que la législation des céréales, en France et en Angleterre. Cependant, nous n’avons pas cru devoir reproduire les notes dont les commentateurs anglais d’Adam Smith ont inondé ce chapitre de son ouvrage. La législation anglaise des céréales est une des formes de l’exploitation de la partie laborieuse de la population par la partie oisive. À quoi bon discuter avec les loups au profit des moutons ? — Quant à ce qui concerne la France, nous sommes heureusement loin du temps où Turgot, Necker, l’abbé Galiani, les économistes et leurs adversaires préludaient aux grandes luttes politiques de la Révolution par leurs curieuses discussions sur la liberté du commerce des grains. Tous ces livres sont aujourd’hui oubliés. Il ne reste que le souvenir des nobles efforts de Turgot, et la conviction que le meilleur préservatif de la disette est la plus grande somme de liberté compatible avec la juste rémunération du travail agricole. A. B.