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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/194

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tugaises, et ne sont pas supérieures à quelques-unes de celles possédées par les Français avant la dernière guerre. Mais les institutions politiques des colonies anglaises ont été bien plus favorables à la culture et à l’amélioration de ces bonnes terres, que ne l’ont été les institutions d’aucune des colonies des trois autres nations.

Premièrement, si l’accaparement des terres incultes est un abus qui n’a pu être, à beaucoup près, totalement prévenu dans les colonies anglaises, au moins y a-t-il été plus restreint que dans toute autre colonie. La loi coloniale, qui impose à chaque propriétaire l’obligation de mettre en valeur et de cultiver, dans un temps fixé, une portion déterminée de ses terres, et qui, en cas de défaut de sa part, déclare que ces terres négligées pourront être adjugées à un propriétaire, est une loi qui, sans avoir été peut-être très-rigoureusement exécutée, a néanmoins produit quelque effet.

Secondement, il n’y a pas en Pensylvanie de droit de primogéniture, et les terres se partagent comme des biens meubles, par portions égales, entre tous les enfants. Dans trois des provinces de la Nouvelle-Angleterre, l’aîné a seulement double portion, comme dans la loi de Moïse. Ainsi, quoique dans ces provinces il puisse arriver quelquefois qu’une trop grande quantité de terres vienne se réunir dans les mains d’un individu, il est probable que, dans le cours d’une ou deux générations, elle se retrouvera suffisamment divisée. À la vérité, dans les autres colonies anglaises, le droit de primogéniture a lieu comme dans la loi d’Angleterre. Mais, dans toutes les colonies anglaises, les terres étant toutes tenues à simple cens[1], cette nature de propriété facilite les aliénations, et le concessionnaire d’une grande étendue de terrain trouve son intérêt à en aliéner la plus grande partie le plus vite qu’il peut, en se réservant seulement une petite redevance foncière. Dans les colonies espagnoles et portugaises, ce qu’on nomme le droit de majorat (jus majoratus), a lieu dans la succession de tous ces grands domaines auxquels il y a quelques droits honorifiques attachés. Ces domaines passent tout entiers à une seule personne et sont, en effet,

  1. Ce qu’on nomme en Angleterre libre soccage est une sorte de tenure suivant laquelle le seigneur n’a droit à autre chose qu’à une redevance fixe et annuelle en argent, ce qui ressemble à nos censives, si ce n’est que les droits seigneuriaux, en cas de mutation par vente ou aliénation, ont été abolis en Angleterre par un statut de Charles II.