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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/197

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réelle que les colons riches ont à payer dans ces occa­sions particulières, mais elles contribuent encore à introduire parmi eux des habitudes de vanité et de profusion dans toutes les autres circonstances. Ce sont non-seulement des impôts fort onéreux à payer accidentellement, mais c’est une source d’impôts perpétuels du même genre, beaucoup plus onéreux encore, les impôts ruineux du luxe et des folles dépenses des particuliers. D’ailleurs, dans les colonies de ces trois nations, le gouvernement ecclésiastique est extrêmement oppressif. Dans toutes la dîme est établie, et dans les colonies d’Espagne et de Portugal on la lève avec la der­niè­re rigueur. Elles sont, en outre, surchargées d’une foule immense de moines men­diants, pour lesquels l’état de mendicité est une chose non-seulement autorisée, mais même consacrée par la religion ; ce qui établit un impôt excessivement lourd sur la classe pauvre du peuple, à laquelle on a grand soin d’enseigner que c’est un devoir que de faire l’aumône à ces moines, et un très-grand péché de la leur refuser. Par-dessus tout cela encore, dans toutes ces colonies, les plus grosses propriétés sont réunies dans les mains du clergé.

Quatrièmement, pour la manière de disposer de leur produit surabondant ou de ce qui excède leur propre consommation, les colonies anglaises ont été plus favorisées et ont toujours joui d’un marché plus étendu que n’ont fait celles de toutes les autres nations de l’Europe. Chaque nation de l’Europe a cherché plus ou moins à se donner le monopole du commerce de ses colonies, et par cette raison elle a empêché les vais­seaux étrangers de commercer avec elle, et leur a interdit l’importation des marchan­dises d’Europe d’aucune nation étrangère ; mais la manière dont ce monopole a été exercé par les diverses nations a été très-différente.

Quelques nations ont abandonné tout le commerce de leurs colonies à une compa­gnie exclusive, obligeant les colons à lui acheter toutes les marchandises d’Europe dont ils pouvaient avoir besoin, et à lui vendre la totalité de leur produit surabondant. L’intérêt de la compagnie a donc été non-seulement de vendre les unes le plus cher possible, et d’acheter l’autre au plus bas possible, mais encore de n’acheter de celui-ci, même à ce bas prix, que la quantité seulement dont elle pouvait espérer de disposer en Europe à un très-haut prix : son intérêt a été non-seulement de dégrader, dans tous les cas, la valeur du produit surabondant des colons, mais encore, dans la plupart des circonstances, de décourager l’accroissement de cette quantité, et de la tenir au-dessous de