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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/383

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plus forte que les gages des juges. Quoique le payement de ces gages soit une dépense de la couronne, c’est une circonstance qui ne peut jamais diminuer de beaucoup les frais nécessaires d’un procès. Mais ce fut moins pour diminuer les frais de justice que pour prévenir la corruption des juges, qu’on les empêcha de recevoir aucun présent ou honoraire des parties.

Les fonctions de juges sont tellement honorables par elles-mêmes, qu’il y a toujours des hommes disposés à s’en charger, quoiqu’elles ne soient accompagnées que de très-faibles émoluments. Les fonctions subalternes de juge de paix, qui entraînent avec elles beaucoup de peine et qui, dans la plupart des circonstances, ne rendent aucuns émoluments, n’en sont pas moins l’objet de l’ambition de la plupart de nos propriétaires ruraux. Les gages forts ou faibles de tous les différents juges, ensemble toute la dépense qu’entraînent l’administration de la justice et son exécution, même dans les pays où cette dépense n’est pas conduite avec une très-grande économie, ne forment qu’une portion bien peu considérable de la dépense totale du gouvernement.

On pourrait, d’ailleurs, défrayer aisément toute la dépense de cette administration de la justice avec ce que payent les parties, comme honoraires de la cour et, sans exposer la justice à aucun véritable danger de corruption, on pourrait ainsi soulager entièrement le revenu public d’une charge permanente, quoique assez légère. Il est très-difficile de taxer d’une manière efficace les honoraires des cours de justice, quand une personne aussi puissante que le souverain y a sa part, et quand il en fait une branche importante de son revenu. Mais c’est une chose très-facile, quand le juge est la seule personne qui en recueille quelque profit. La loi vient aisément à bout de faire respecter le règlement par les juges, quoiqu’elle ne soit pas toujours en état de le faire respecter par le souverain. Quand les honoraires des cours sont réglés et fixés d’une manière bien précise, quand ils sont payés tous à la fois, à une certaine période du procès, entre les mains d’un caissier ou receveur, pour être par lui distribués, d’après des proportions déterminées, à chacun des juges, après la décision du procès et non avant, il semble qu’il n’y a pas là plus de danger de corruption que si ces honoraires étaient entièrement supprimés. Sans occasionner aucune augmentation considérable dans les frais de procédure, on pourrait rendre ces honoraires suffisants pour défrayer complètement la totalité des dépenses de l’administration judiciaire. S’ils n’étaient payés aux