Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/39

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propres qu’auparavant à remplir les fonctions de monnaie. Pour faire les mêmes achats, il faut nous charger d’une bien plus grande quantité de ces métaux, et il faut porter avec nous dans notre poche 1 schelling, là où une pièce de 4 pence nous eût suffi auparavant. Il serait assez difficile de décider qui l’emporte de ce léger inconvénient ou de cette futile commodité ; ni l’un ni l’autre n’auraient pu apporter de changement bien important dans l’état de l’Europe, et cependant la découverte de l’Amérique en a produit un de la plus grande importance. En ouvrant à toutes les marchandises de l’Europe un nouveau marché presque inépuisable, elle a donné naissance à de nouvelles divisions de travail, à de nouveaux perfectionnements de l’industrie, qui n’auraient jamais pu avoir lieu dans le cercle étroit où le commerce était anciennement resserré, cercle qui ne leur offrait pas de marché suffisant pour la plus grande partie de leur produit. Le travail se perfectionna, sa puissance productive augmenta, son produit s’accrut dans tous les divers pays de l’Europe, et en même temps s’accrurent avec lui la richesse et le revenu réel des habitants. Les marchandises de l’Europe étaient pour l’Amérique presque autant de nouveautés, et plusieurs de celles de l’Amérique étaient aussi des objets nouveaux pour l’Europe. On commença donc à établir une nouvelle classe d’échanges auxquels on n’avait jamais songé auparavant, et qui naturellement auraient dû être pour le nouveau continent une source de biens aussi féconde pour que l’ancien. Mais la barbarie et l’injustice des Européens firent d’un événement, qui eût dû être avantageux aux deux mondes, une époque de destruction et de calamité pour plusieurs de ces malheureuses contrées.

La découverte d’un passage aux Indes orientales par le cap de Bonne-Espérance, qui eut lieu presque à la même époque, ouvrit peut-être au commerce étranger un champ plus vaste encore que celle de l’Amérique, malgré le plus grand éloignement de ces pays. Il n’y avait en Amérique que deux nations qui fussent, à quelques égards, supérieures aux sauvages, et elles furent détruites presque aussitôt que découvertes. Le reste était tout à fait sauvage. Mais les empires de la Chine, de l’Indostan, du Japon, ainsi que plusieurs autres dans les Indes orientales, sans avoir des mines plus riches en or et en argent, étaient, sous tous les rapports, beaucoup plus opulents, mieux cultivés et plus avancés dans tous les genres d’arts et de manufactures, que les empires du Mexique ou du Pérou, quand même nous voudrions ajouter