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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/393

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ché pour toutes les marchandises de ce genre se resserrerait tellement, que leur production en serait en grande partie dé­cou­ragée et que les branches les plus importantes de l’industrie nationale se trouve­raient totalement anéanties.

En second lieu, une taxe sur les voitures, proportionnée à leur poids, quoiqu’elle soit un impôt très-légal quand son produit n’est appliqué à aucun autre objet qu’à la réparation des routes, devient un impôt très-illégal dès qu’on en applique le produit à une autre destination ou aux besoins généraux de l’État. Quand ce produit s’applique uniquement à la réparation de la route, chaque voiture est censée payer précisément pour le déchet que son passage occasionne. Mais quand il est employé à tout autre objet, chaque voiture est censée payer pour plus que ce déchet, et contribue à pour­voir à quelques autres besoins de l’État. Or, comme le droit de barrières fait hausser le prix des marchandises en raison de leur valeur, il est principalement payé par le con­som­mateur de denrées grossières et volumineuses, et non par ceux qui consomment des marchandises légères et précieuses. Ainsi, quel que fût le besoin de l’État auquel cette taxe serait destinée, c’est aux dépens du pauvre principalement, et non à ceux du riche qu’on pourvoirait à ce besoin ; c’est aux dépens de ceux qui sont le moins en état d’y contribuer, et non de ceux qui sont en état de le faire.

Troisièmement, si le gouvernement venait une fois à négliger la réparation des grandes routes, il serait bien plus difficile qu’il ne l’est à présent de contraindre les percepteurs du droit de barrières à en appliquer quelque chose à sa vraie destination. Ainsi, on pourrait lever sur le peuple un très-gros revenu sans qu’il y en eût la moin­dre partie appliquée au seul objet auquel doive jamais l’être un revenu levé de cette manière. Si la pauvreté et la basse condition des préposés à l’entretien des routes em­pê­chent aujourd’hui qu’on ne puisse aisément leur faire réparer les fautes de leur administration, dans le cas que l’on suppose ici, leur richesse et leur importance rendraient la chose dix fois plus difficile.

En France, les fonds destinés à l’entretien des grandes routes sont sous la direction immédiate du pouvoir exécutif. Ces fonds consistent en partie dans un certain nombre de journées de travail que les gens de la campagne, comme en beaucoup d’autres endroits de l’Europe, sont forcés d’employer à la réparation des chemins, et en partie dans