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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/418

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J’aurais dû observer que, dans le commerce que fit la compagnie de la mer du Sud par le moyen de son vaisseau annuel, le seul commerce sur lequel on se soit jamais attendu qu’elle ait pu faire quelque profit considérable, elle ne fut pas sans concurrents, soit dans le marché intérieur, soit dans le marché étranger. À Carthagène, à Porto-Bello, à la Vera-Cruz, elle avait contre elle la concurrence des marchands espagnols qui apportaient de Cadix à ces trois marchés des marchandises européennes de la même espèce que celles qui composaient la cargaison d’exportation de son vaisseau, et en Angleterre elle avait contre elle la concurrence des marchands anglais qui importaient de Cadix des marchandises des Indes Occidentales espagnoles, de même espèce que celles qui composaient sa cargaison d’importation. À la vérité, les marchandises tant des marchands anglais que des marchands espagnols étaient peut-être assujetties à des droits plus forts que celles de la compagnie ; mais probablement les pertes causées par la négligence, la profusion et les malversations des agents de la compagnie étaient une taxe beaucoup plus lourde que tous les droits possibles. Il paraît démontré par l’expérience la plus constante qu’une compagnie par actions ne saurait se soutenir avec succès dans aucune branche de commerce étranger, toutes les fois que les commerçants particuliers peuvent venir ouvertement et légalement en concurrence avec elle.

L’ancienne compagnie anglaise des Indes Orientales fut établie en 1600, par une charte de la reine Élisabeth. Dans les douze premiers voyages que ses vaisseaux firent aux Indes, il paraît qu’elle commerça comme compagnie privilégiée avec des capitaux séparés, quoique seulement dans les vaisseaux appartenant en commun à la compagnie. En 1612, elle s’organisa en société par actions. La charte était exclusive et, quoique non confirmée par acte du parlement, elle était dans ce temps-là réputée transmettre un privilège exclusif. Ainsi, pendant beaucoup d’années, elle ne fut pas très-contrariée par le commerce interlope. Son capital, qui n’alla jamais au-delà de 744000 liv., et dont l’action était de 50 liv., ne fut jamais assez exorbitant ni ses affaires assez étendues pour pouvoir fournir prétexte à beaucoup de négligence et de profusions, ou pour couvrir de grandes malversations. Malgré quelques pertes extraordinaires, causées en partie par la malveillance de la compagnie hollandaise des Indes Orientales, et en partie par d’autres accidents, elle fit le commerce avec beaucoup de succès