Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/457

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cause de l’incapacité et de la négligence des maîtres qu’on a, et de la difficulté ou plutôt de l’impossibilité qu’il y a de s’en procurer de meilleurs dans l’état actuel des choses. Et puis, les occupations auxquelles les gens bien nés et dans l’aisance passent la plus grande partie de leur vie ne sont pas, comme celles des gens du commun du peuple, des occupations simples et uniformes ; elles sont presque toutes extrêmement compliquées et de nature à exercer leur tête plus que leurs mains. Il ne se peut guère que l’intelligence de ceux qui se livrent à de pareils emplois vienne à s’engourdir faute d’exercice. D’un autre côté, les emplois des gens bien nés et ayant quelque aisance ne sont guère de nature à les enchaîner du matin au soir. En général, ils ne laissent pas d’avoir certaine quantité de moments de loisirs pendant lesquels ils peuvent se perfectionner dans toute branche de connaissances utiles ou agréables dont ils auront pu se donner les premiers éléments, ou dont ils auront pu prendre le goût dans la première époque de leur vie.

Il n’en est pas de même des gens du peuple ; ils n’ont guère de temps de reste à mettre à leur éducation. Leurs parents peuvent à peine suffire à leur entretien pendant l’enfance. Aussitôt qu’ils sont en état de travailler, il faut qu’ils s’adonnent à quelque métier pour gagner leur subsistance. Ce métier est aussi, en général, si simple et si uniforme, qu’il donne très-peu d’exercice à leur intelligence ; tandis qu’en même temps leur travail est à la fois si dur et si constant, qu’il ne leur laisse guère de loisir, encore moins de disposition à s’appliquer, ni même à penser à aucune autre chose.

Mais quoique dans aucune société civilisée les gens du peuple ne puissent jamais être aussi bien élevés que les gens nés dans l’aisance, cependant les parties les plus essentielles de l’éducation, lire, écrire et compter, sont des connaissances qu’on peut acquérir à un âge si jeune, que la plupart même de ceux qui sont destinés aux métiers les plus bas ont le temps de prendre ces connaissances avant de commencer à se mettre à leurs travaux. Moyennant une très-petite dépense, l’État peut faciliter, peut encourager l’acquisition de ces parties essentielles de l’éducation parmi la masse du peuple, et même lui imposer, cri quelque sorte, l’obligation de les acquérir.

L’État peut faciliter l’acquisition de ces connaissances, en établissant dans chaque paroisse ou district une petite école où les enfants soient instruits pour un salaire si modique, que même un simple ouvrier puisse le donner ; le maître étant en partie, mais non en totalité, payé