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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/482

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Le succès de cette nouvelle doctrine fut si grand et si général, qu’elle fournit aux princes qui se trouvaient alors être mal avec la cour de Rome le moyen de détruire aisément dans leurs États l’église dominante ; et celle-ci, qui avait perdu le respect et la vénération des classes inférieures du peuple, ne pouvait guère opposer de résistance. La cour de Rome avait désobligé quelques-uns des petits princes du nord de l’Allemagne, qu’elle avait probablement regardés comme trop peu importants pour valoir la peine d’être ménagés. En conséquence, ceux-ci établirent généralement la religion réformée dans leurs États. La tyrannie de Christiern II et de Troll, archevêque d’Upsal, mit Gustave Vasa à même de les chasser l’un et l’autre de Suède. Le pape prit le parti du tyran et de l’archevêque, et Gustave Vasa ne trouva aucune difficulté à établir la réforme en Suède. Christiern II fut ensuite déposé du trône de Danemark, où sa conduite l’avait rendu aussi odieux qu’en Suède. Le pape cependant se montra encore disposé à le favoriser, et Frédéric de Holstein, qui était monté sur le trône à sa place, se vengea du pape en suivant l’exemple de Gustave. Les magistrats de Berne et de Zurich, qui n’avaient pas de querelle particulière avec le pape, établirent avec grande facilité la réformation dans leurs cantons respectifs, où, par une imposture un peu plus grossière encore que leurs tromperies ordinaires, quelques gens du clergé venaient tout nouvellement de rendre leur ordre entier odieux et méprisable[1].

Dans une situation aussi critique, la cour papale avait bien assez à faire de cultiver l’amitié des puissants monarques de France et d’Espagne, dont le dernier était à cette époque empereur d’Allemagne. Avec leur assistance elle put venir à bout, quoique non sans de grandes difficultés et beaucoup de sang répandu, ou d’empêcher totalement la réformation dans leurs États, ou d’en arrêter un moment les progrès. Elle était assez disposée aussi à traiter le roi d’Angleterre avec une

  1. Voyez l’Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, par Voltaire, chap. cxxix.