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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/548

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Dans ces cantons suisses, on ne regarde pas, à ce qu’il semble, comme une loi très-fâcheuse d’obliger chaque citoyen à déclarer publiquement, sous serment, le montant de sa fortune. À Hambourg, une telle loi passerait pour la plus dure possible. Des marchands engagés dans des entreprises de commerce hasardeuses tremblent tous à l’idée d’être obligés d’exposer à chaque instant le véritable état de leurs affaires. Ils sentent bien qu’il ne leur arriverait que trop souvent de voir par là leur crédit ruiné et leurs projets avortés. Des gens sages et économes, qui sont étrangers à tous les projets de ce genre, ne s’imaginent pas avoir besoin d’une pareille réticence.

En Hollande, bientôt après l’élévation du dernier prince d’Orange au stathoudérat, on établit sur la totalité de la fortune de chaque citoyen un impôt de 2 p. 100, ou un cinquantième denier, comme on l’appela. Chaque citoyen se taxa lui-même, et paya sa contribution de la même manière qu’à Hambourg ; en général on présume que l’impôt fut payé avec une grande fidélité. Le peuple avait à cette époque le plus grand attachement pour son nouveau gouvernement, qu’il venait d’établir par une insurrection générale. L’impôt ne devait se payer qu’une seule fois, pour soulager l’État dans une occurrence particulière. Il est vrai qu’il était trop lourd pour être permanent. Dans un pays où le taux courant de l’intérêt n’excède guère 3 p. 100, un impôt de 2 p. 100 se monte à 13 schellings 4 deniers par livre du plus haut revenu net qu’on puisse tirer communément d’un capital. C’est un impôt que très-peu de gens seraient en état de payer sans prendre plus ou moins sur leurs capitaux. Dans une nécessité particulière, par un grand élan de patriotisme, le peuple peut faire un effort extraordinaire, et sacrifier même une partie de ses capitaux individuels pour soulager l’État. Mais il est impossible qu’il continue ce sacrifice pendant quelque temps ; et s’il le faisait, l’impôt le ruinerait bientôt si complètement, qu’il le réduirait tout à fait à l’impuissance de soutenir l’État.

L’impôt établi sur les capitaux en Angleterre par le bill de la taxe foncière, en le supposant même dans toute sa proportion avec le capital, n’a pas pour objet de retrancher sur le capital ni d’en prendre la moindre partie. On a seulement eu l’intention de mettre sur l’intérêt de l’argent un impôt proportionné à celui sur le revenu des terres, de manière que, quand ce dernier impôt est à 4 schellings pour livre, l’autre soit aussi à 4 schellings pour livre. L’impôt de Hambourg et les impôts encore plus modérés d’Unterwald et de Zurich sont de même des impôts qu’on