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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/582

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finances de son pays, en substituant à la plus grande partie des autres impôts cette espèce d’impôt, la plus ruineuse de toutes. Il n’y a rien de si absurde, dit Cicéron, qui n’ait été avancé par quelque philosophe.

Les impôts sur la viande de boucherie sont encore plus communs que ceux sur le pain. À la vérité, on peut mettre en doute si la viande de boucherie est nulle part une chose de première nécessité. Il est bien connu par l’expérience, que sans recourir à aucune viande on peut trouver la nourriture la plus abondante, la plus saine, la plus substantielle et la plus agréable dans les grains et autres végétaux, avec l’aide du lait, du fromage et du beurre, ou bien de l’huile quand on ne peut avoir de beurre. Il n’y a pas d’endroits où les règles de la décence exigent qu’un homme mange de la viande, comme elles exigent dans plusieurs qu’il ait une chemise ou des souliers.

Les objets de consommation, soit de nécessité, soit de luxe, peuvent être imposés de deux différentes manières. On peut faire payer au consommateur une somme annuelle pour pouvoir consommer ou faire usage de marchandises d’une certaine espèce, ou bien on peut imposer les marchandises pendant qu’elles sont dans les mains du marchand et avant qu’elles aient passé dans celles du consommateur. Les objets de consommation qui durent un temps considérable avant d’être totalement consommés sont ceux qui sont les plus propres à être imposés de la première manière ; ceux dont la consommation se fait immédiatement, ou au moins plus promptement, sont les plus propres à être imposés de l’autre manière. La taxe sur les carrosses et celle sur la vaisselle sont des exemples du premier de ces deux modes d’imposition. La plupart des autres droits d’accise et de douane sont des exemples du dernier.

Un carrosse bien ménagé peut servir dix ou douze ans. On pourrait bien l’imposer une fois pour toutes, avant qu’il sortît des mains du carrossier. Mais il est certainement plus commode pour l’acheteur de payer 4 livres par an pour le privilège de rouler carrosse[1], que de payer tout à

  1. Les droits imposés en 1785 et 1789 sur les carrosses vont à 8 liv. sterl. par voiture à quatre roues, avec une augmentation progressive sur les deuxième et troisième voitures, outre le droit de 1 liv. sterl. sur le premier cheval et le droit progressif sur les autres : ces derniers droits ont été augmentés en 1796, 1797 et 1801. Le triplement des taxes assises, qui ont eu lieu en 1798, a porté sur ces droits qui en font partie.