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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/584

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à sa table serait imposé bien plus doucement qu’un autre qui n’aurait que très-peu de convives.

Secondement, ce mode d’imposition de payer par année, par semestre ou par quartier, une permission pour consommer certaines marchandises, diminuerait extrêmement une des principales commodités des impôts sur les choses d’une prompte consommation, c’est-à-dire la facilité de payer petit à petit. Dans le prix de 3 pence 1/2 que se paie à présent le pot de porter, les différentes taxes sur la drêche, le houblon et la bière, y compris le profit extraordinaire dont le brasseur charge la marchandise pour avoir avancé ces taxes, peuvent se monter peut-être à environ 3 demi-pence. Si un ouvrier peut sans se gêner, dépenser ces 3 demi-pence, il achète un pot de porter. S’il ne le peut pas, il se contente d’une pinte, et comme ce qu’on épargne est autant de gagné, sa tempérance lui fait ainsi gagner 1 farting[1]. Il paie l’impôt petit à petit selon qu’il est en état de le payer, et quand il a le moyen de le payer. Chaque acte de payement est parfaitement volontaire, et il est le maître de s’en dispenser si cela lui convient mieux. Troisièmement, ces sortes d’impôts auraient moins l’effet de lois somptuaires. Quand la permission sera une fois achetée, que le consommateur boive beaucoup ou boive très-peu, l’impôt sera le même pour lui. Quatrièmement, s’il fallait qu’un ouvrier payât en une seule fois par année, par demi-année ou par quartier, un impôt égal à ce qu’il paie à présent sans embarras ou presque sans embarras, sur chacun des différents pots ou pintes de porter qu’il boit dans un pareil espace de temps, la somme pourrait souvent le gêner extrêmement. Ainsi, il paraît évident qu’un pareil mode d’imposition ne pourrait jamais, à moins de beaucoup de gêne et d’oppression pour les contribuables, produire un revenu approximativement égal à ce qu’on retire par le mode actuel d’imposition sans opprimer personne. Néanmoins, dans plusieurs pays, des denrées dont la consommation se fait immédiatement ou dans un temps fort court, sont imposées de cette manière. En Hollande, on paie tant par tête pour la permission de boire du thé.

  1. Ce calcul parait exiger quelque éclaircissement. Le pot de porter, tout impôt déduit, eût coûté 2 pence. L’ouvrier, à cause de l’impôt, ne pouvant acheter le pot, se contente de la pinte ou moitié du pot, laquelle, tout impôt compris, lui coûte 1 penny 1/2 ; donc il a réellement économisé ; de penny ou un farting, et cette épargne est l’effet de l’impôt.