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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/660

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nale en est venue par degrés à contenir une quantité d’argent de plus en plus petite.

Quelquefois les nations ont, par le même motif, altéré le titre de leurs monnaies, c’est-à-dire qu’elles y ont mêlé une plus grande quantité d’alliage. Si, par exemple, dans une livre pesant de notre monnaie d’argent, au lieu de 18 deniers pesant d’allia­ge, conformément au titre actuel, on y en mêlait huit onces, 1 livre sterling ou 20 sch. de cette monnaie ne vaudraient guère plus de 6 sch. 8 deniers de notre mon­naie actuelle. La quantité d’argent que contiennent 6 sch. 8 deniers de notre monnaie actuelle se trouverait portée ainsi à très-peu de chose près à la dénomination de 1 livre sterling. L’altération dans le titre de la monnaie a précisément le même effet que ce que les Français appellent une augmentation des monnaies ou un surhaussement direct de leur dénomination.

Une augmentation des monnaies ou un surhaussement direct de leur dénomination est toujours et ne peut manquer d’être, de sa nature, une opération ouverte et déclarée. Par cette opération, des pièces d’un poids et d’un volume plus petits sont appelées du nom que l’on donnait auparavant à des pièces d’un plus fort poids et d’un plus gros volume. L’altération de titre, au contraire, a été en général une opération cachée. Par cette dernière opération, les hôtels des monnaies mettaient en émission des pièces d’une bien moindre valeur que celles qui avaient eu cours jusqu’alors, mais pourtant de la même dénomination et à peu près semblables, au moins autant qu’on pouvait en venir à bout, quant au poids, au volume et à l’apparence. Quand le roi de France, Jean[1], altéra le titre de ses monnaies pour payer ses dettes, tous les officiers de ses hôtels des monnaies furent obligés, par serment, au secret. Les deux opérations sont injustes ; mais un simple surhaussement est une injustice ouverte et violente, tandis qu’une altération du titre est une fraude et une fourberie. Aussi cette dernière espèce d’opération, du moment qu’elle a été découverte (et elle ne peut pas rester très-longtemps cachée), a toujours excité une indignation beaucoup plus forte que l’autre. Il est très-rare que la monnaie, après avoir subi quelque surhaussement considérable dans sa dénomination, ait jamais été remise sur le pied de son ancien poids ; mais, après les plus

  1. Voyez le Glossaire de Ducange, au mot Moneta, édition des Bénédictins. (Note de l’auteur.)