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LA CORVÉE

cailloux, des feuilles toutes jaunies éparses sur le gazon ; à l’entour, des grands arbres, puis à quinze pas du foyer, dans le beau mitan de la place une touffe d’érables.

La brayerie de chez nous est très vieille. Je me suis laissé raconter son histoire par grand’père. Elle existait avant lui, et pourtant mon grand-père n’était pas une jeunesse puisqu’il a défuntisé à quatre-vingt-quatorze ans. On l’a bâtie l’année de la grande semaille du lin. À l’automne, un mesieu de la ville devait venir le chercher. L’automne arriva, mais le mesieu resta invisible. Pour sûr, nos vieux n’étaient pas d’humeur à brayer seuls des centaines de bottes de lin, en le faisant griller dans le four à pains. Un beau matin, il y eut du parlement entre les gens du rang, et on alla édifier la brayerie commune au bout du Coteau de Pins.

…À l’abri des rafales et des entêtements de la tempête, on creusa au pied du roc, une fosse qui devait servir de braisier. Aux angles, on planta les montants, quatre bâtons noueux qui se terminaient en fourches. Jetez là-dessus de bonnes gaules d’épinette rouge, et vous aurez cette espèce d’échelle qu’on appelle à la brairie l’échaufaud

Pour le séchage du lin, il ne reste plus qu’à étendre sur ce gril rustique une mince couche de lin, et qu’à allumer un feu pas trop malin.