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LA CORVÉE

courvée. La dernière charrette entra dans la cour de Bapaume qu’il était à peine sept heures.

Il était temps, du reste, car les nuages floconneux de tout à l’heure, au ras de l’horizon, montaient rapidement par grosses volutes grises, marbrées de jaune. Le soleil, encore assez haut, disparut subitement mangé par l’avalanche. Quelques minutes s’écoulèrent, puis l’avalanche se fit au bas toute verdâtre avec un ourlet blanc qui paraissait argenté. Des zébrures étincelantes apparurent. Une rafale passa, courbant les arbres, et soulevant la poussière du chemin en flots aveuglants. Au loin, le mont St-Hilaire n’était plus.

* * *

Toute la bande s’était réunie sur la galerie de devant, d’où l’on avait, grâce à une éclaircie de l’autre côté du chemin, bonne vue d’ensemble sur le Bassin et jusqu’à Chambly. On voyait maintenant, de ce côté-là, tout l’horizon barré comme d’un mur noir, à travers quoi il semblait que plus rien, désormais, ne pût passer. Et cela marchait, courait plutôt, d’un bloc, attirant tout à soi. Quand cela atteignit le Bassin, les flots bouillonnants et fouettés d’écume parurent un moment vouloir se ruer à l’assaut de l’énorme chose, et bientôt après on commença à entendre un bruit singulier, fait