Page:Soderhjelm - Marie-Antoinette et Barnave.djvu/12

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la constitution et à la pratiquer sans arrière-pensée. Glagau le prit au mot. Il rappela que, dans ses lettres à Fersen et à Mercy, Marie-Antoinette déclare insupportable le régime institué par l’Assemblée nationale et manifeste un profond mépris à l’égard des Feuillants. Or, dans la note qu’elle a rédigée pour son propre usage et placée en tête de sa correspondance avec eux, elle reproduit — comme l’expression de ses sentiments personnels, affirment Heidenstam et Glagau — les protestations de sincérité et d’estime qu’elle leur prodigue dans ses lettres. D’autre part, Miss Bradby, biographe de Barnave, s’offensait qu’on pût croire son héros capable d’un mensonge, même pour sauver sa tête. Glagau et Miss Bradby tiraient argument de leurs remarques pour crier au faussaire et c’est ce qui nous importe ici.

On accordera sans peine, ou je me trompe fort, que le plaidoyer sentimental de Miss Bradby ne peut prévaloir contre la démonstration de Mlle Söderhjelm et suppose acquis ce qui est en question. Pour la reine, Heidenstam s’est fait illusion en imaginant que la présente correspondance modifierait l’idée que nous nous faisons de son attitude d’après ses lettres à Mercy et à Fersen. À ces derniers, elle ne cesse de répéter que, dans la position où elle se trouve, elle est obligée de ménager les constitutionnels, de les endormir, pour gagner du temps et pour garantir la sécurité de sa famille ; sa correspondance avec Barnave ne pouvait être par conséquent que ce qu’elle est ; elle ne peut rétorquer les témoignages de duplicité qu’elle a donnés librement dans les lettres adressées à des intimes ; tout au plus peut-on admettre qu’en traitant les constitutionnels de scélérats et de gueux, elle voulait ménager la jalousie de Fersen et qu’elle conservait nonobstant quelque reconnaissance pour les marques de respectueux dévouement qu’ils lui prodiguaient ; quant à la note qui précède sa correspondance avec Barnave, elle ne fait que résumer les pourparlers qui l’ont préparée et les lettres qui manquent ; elle récapitule les arguments et les protestations dont Marie-Antoinette a usé pour déterminer les Feuillants à persister dans leur voie : c’est un memento et rien de plus. Ces constatations sont-elles fâcheuses pour la mémoire de la reine et de Barnave ? Mr Wel-