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lois pénales de l’Empire russe[1]. Là, où il n’y a pas d’unité vivante et intérieure, l’intégrité extérieure ne peut être soutenue que par la violence et la fraude[2].


À propos de la persécution cruelle suscitée par le gouvernement ecclésiastique et civil contre une secte de protestants indigènes (les stundistes) dans la Russie méridionale, Aksakov donne une expression vivante à sa juste indignation :


Supprimer par la prison la soif spirituelle quand on n’a rien pour la satisfaire ; répondre par la prison au besoin sincère de la foi, aux questions de la pensée religieuse qui s’éveille ; prouver par la prison la vérité de l’orthodoxie, c’est saper par la base toute notre religion et rendre les armes au protestantisme victorieux[3].


Et cependant il se trouve que les lois pénales, avec leur « prison » qui a tellement indigné notre patriote, sont absolument indispensables pour conserver « l’Église dominante ». Les défenseurs les plus sincères et les plus raisonnables de cette Église (par exemple l’historien Pogodine, cité avec beaucoup d’autres par notre auteur) avouent franchement que la liberté religieuse une fois admise en Russie la moitié des paysans orthodoxes passeront au raskol (schisme des vieux-croyants très nombreux déjà malgré toutes les persécutions) et la moitié des gens du monde deviendra catholique.

  1. Œuvres complètes d’Ivan Aksakov, tome IV, p. 84.
  2. Ibid., p. 100.
  3. Ibid., p. 72.