et de la parole libre — ce système matérialiste nous a amenés une fois aux désastres de Sébastopol. La conscience du peuple russe fidèlement représenté par son souverain parla à haute voix. La Russie fit pénitence et se releva par un acte de justice, l’émancipation des serfs. Cet acte qui fut la gloire d’un grand règne n’est cependant qu’un commencement. L’œuvre de l’émancipation sociale ne peut pas se borner à l’ordre matériel. Le corps de la Russie est libre, mais l’esprit national attend encore son 19 février. Ce n’est pas pourtant avec le corps seul, ce n’est pas par un travail purement matériel que la Russie pourra accomplir sa mission historique et manifester son idée nationale vraie. Et comment pourrait-elle se manifester, la pauvre idée russe, enfermée dans une prison étroite, privée d’air et de lumière et gardée par des eunuques méchants et jaloux ?
Ce n’est pas en reculant vers le règne de Nicolas Ier et en imitant les grandes erreurs de ce grand souverain qu’on pourrait réparer les défauts essentiels dans l’œuvre incomplète d’Alexandre II. On ne doit pas tenter la Providence en oubliant trop vite les leçons historiques qu’elle nous a données. Il est permis d’espérer que le sentiment religieux, la bonne volonté et la raison droite, qui distinguent l’empereur actuel, sauront le défendre contre des conseillers mal inspirés qui voudraient lui imposer la politique néfaste, jugée et condamnée à Sébastopol.