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ET A LA CHINE. Liv. IV.

de se passer les mains l’une sur l’autre sans se les presser.

Les Madégasses ont différentes épreuves par lesquelles ils s’imaginent reconnoître la vérité. Les principales sont celles de l’eau, du Tanguin & du feu. La première consiste à jurer par le Cayman : ceux qui s’y soumettent sont obligés de traverser une rivière où ces reptiles se trouvent en grande quantité, & de rester un certain tems dans le milieu ; si les Caymans ne les attaquent point, on les tient pour innocens. Les habitans du sud ont une autre épreuve par l’eau : dans cette dernière, on attend que la mer soit extrêmement courroucée ; alors on expose le coupable sur une roche placée en dehors du fort Dauphin, & s’il est respecté par les vagues, son innocence est reconnue. Celle du feu se pratique en passant un fer rouge sur la langue ; & comme il est impossible qu’elle ne soit pas brûlée, ceux qui la subissent sont toujours regardés comme coupables.

Le Tanguin est un des poisons les plus terribles du règne végétal ; dans les cas douteux où les preuves manquent, on en fait avaler aux criminels ; mais il n’y a guères que ceux qui possédent des esclaves & des troupeau qui passent par cette épreuve. Lorsqu’un chef perd quelqu’un de ses parens, s’il connoît un particulier riche, il forme un cabar, c’est-à-dire, une assemblée ou conseil des principaux du village & des chefs des environs ; il accuse en leur présence celui dont il veut usurper le bien d’avoir empoisonné son parent, & demande qu’il prenne le Tanguin : si l’on décide qu’il le fera, le chef va l’annoncer lui-même à l’accusé. Celui-ci n’ayant point commis le crime, est très-persuadé que le poison ne l’incommodera pas ; il désigne le jour auquel il doit te prendre,