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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/195

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actions basses sont infiniment agréables, et que nous prenons même du contentement à ouïr celles d’un gentilhomme écolier qui fait paraître la subtilité de son esprit et la grandeur de son courage dès sa jeunesse.

— Vous ne savez pas, repartit Francion, que vous recevrez bien plus de plaisir à entendre ce qui m’est advenu en un âge plus haut, d’autant que ce sont choses plus sérieuses, et où vous trouverez bien plus de quoi vous repaître l’esprit.

— Je n’attends rien moins que des merveilles de votre vie courtisane, dit le seigneur ; car j’en ai déjà ouï quelque chose de nonpareil par de certaines personnes qui venaient à la cour : c’est pourquoi je voudrais que vous y fussiez déjà, et que vous eussiez passé toutes les classes, quand vous devriez être fouetté dix fois à chacune ; néanmoins je ne désire pas sauter d’un temps à l’autre.

— Vous vous représentez avec grâce les choses comme si elles étaient présentes, lui dit Francion, et vraiment, je vous sais bon gré de ce que vous souhaitez ainsi de me voir tant donner le fouet. Où pourrais-je trouver des fesses qui y puissent résister ? Je vous prie, faites forger une cuirasse à mon cu, et la faites peindre de couleur de chair, ou prêtez la peau du vôtre pour le couvrir.

— Ne vous souciez pas, nous parviendrons à tout, lui répondit-il.

Achevant ces paroles, il vit que Francion tira un peu à soi le rideau de son lit, et avançant la tête jeta les yeux à l’endroit le plus reculé de la chambre.

— Que regardez-vous, monsieur ? lui dit-il alors.

— Je voulais voir, répondit Francion, s’il n’y avait