Aller au contenu

Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/201

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
175

Quelle vilenie de voir qu’il n’y a plus que des barbares dans les universités pour enseigner la jeunesse ! Ne devraient-ils pas considérer qu’il faut de bonne heure apprendre aux enfants à inventer quelque chose d’eux-mêmes, non pas les renvoyer à des recueils, à quoi ils s’attardent et s’engourdissent tandis ? On ne sait point là ce que c’est que de pureté de langage, ni de belles dictions, ni de sentences, ni d’histoires citées bien à propos, ni de similitudes bien rapportées. Mon Dieu ! que les pères sont trompés, pensant avoir donné leurs fils à des hommes qui les rempliront d’une bonne et profitable science ! Les précepteurs sont des gens qui viennent presque de la charrue à la chaire, et sont en peu de temps cuistres, pendant lequel ils dérobent quelques heures, pour étudier, en passant, de celles qu’ils doivent au service de leurs maîtres. Tandis que leur morue est dessus le feu, ils consultent quelque peu leurs livres, et se font à la fin passer maîtres ès arts ; ils lisent seulement les commentaires et les scoliastes des auteurs, afin de les expliquer à leurs disciples, et leur donner des annotations dessus. Au reste, ils ne savent ce que c’est que de civilité, et faut avoir un bon naturel, et bien noble, pour n’être point corrompu, étant sous leur charge ; car ils vous laissent accoutumer à toute sorte de vicieuses habitudes sans vous en reprendre.

Notre régent, avec toutes ses belles qualités, ne laissa pas de nous vouloir faire jouer des jeux français de sa façon, car il tranchait gourdementwkt du poète. Il y eut beaucoup d’écoliers qui prirent deux personnages, et le désir que j’avais de me voir une fois prince en ma vie