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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/216

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gnis point de m’en retourner au collège, parce que je savais qu’elle était aussi capable d’apaiser la colère d’Hortensius que l’est un verre d’eau de rabattre la force d’un verre de vin.

Elle n’avait que ses deux voisines en sa compagnie, comme elle l’avait promis, et entra avec elles chez Hortensius ; non pas par la grande porte du collège, mais par une de derrière qu’il avait sur la rue, et que, pour ce sujet, il venait de faire ouvrir, encore qu’il y eût plus de six ans qu’elle était fermée.

Après quelques devis amoureux, il prit une plume, et écrivit sur un papier de certains vers à la louange de sa maîtresse. Une des bourgeoises loua son courage ; et, se souvenant d’avoir vu cette même poésie parmi celles d’un poète de ce temps, comme elle vit qu’il s’arrêtait, qu’il rongeait ses ongles, et qu’il tapait du pied tout de la même sorte que s’il eût eu bien de la peine à parachever les stances qu’il feignait de composer, elle lui dit par raillerie :

— Monsieur, si vous ne vous souvenez point de ce qui suit, je vous dicterai ; écrivez, je le sais bien par cœur, il n’y a qu’un jour que je lus encore cette pièce-là dans un livre dont l’on m’a fait présent.

— Je ne le pense pas, répondit Hortensius, ceci vient entièrement de ma muse.

— Je m’en vais vous réciter la suite, réplique la bourgeoise et vous verrez que tout répondra à ce que vous avez déjà écrit.

Alors, lui ayant dit tout mot à mot, elle ne s’en contenta pas, mais entra en l’étude, dans laquelle elle cher-