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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/219

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encore trois coups ; de sorte qu’il chancelait à chaque moment. L’on lui demanda s’il apprenait à danser, et s’il répétait les passages de courante. N’ayant pas le soin de cacher sa maladie, il répondit :

— Il y a un certain auteur anonyme, que je pense, qui dit que Bacchus dolosus luctator est, primum caput, deinde pedes tentat. Ainsi je reconnais bien cette cautèle, medius Fidius ; il m’a donné le crochet pour me faire tomber, cependant qu’il m’a assailli par en haut au même temps.

Comme il tenait ce discours, l’amant de Frémonde vint avec deux de ses amis, et encore deux bourgeoises des plus gausseuses de la ville.

— Monsieur, dit l’avocat à Hortensius, ayant à parler à mademoiselle Frémonde, nous sommes entrés franchement en votre maison, de quoi je vous supplie de nous excuser.

— Il n’est pas besoin que vous usiez de compliments, interrompit Frémonde, je m’assure que monsieur est très aise de votre venue et n’a point d’ennui, sinon de ce qu’il voit que vous êtes arrivés trop tard pour la collation.

Alors une de ses compagnes dit : « Il y a bien encore quelque peu de vin muscat. »

Salva pace, madame, dit le cuistre.

— Eh bien, dit Hortensius, va-t’en mettre ordre que mon compère le cabaretier m’en envoie de meilleur, avec quelque pièce de rôt.

Or, il disait cela parce qu’étant déjà fort tard, et voyant que les derniers venus avaient amené un vielleux, il s’imaginait bien qu’il fallait qu’il donnât à sou-