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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/222

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le même air qu’il commença à ronfler, et Hortensius, s’étant accordé avec lui, dit à la compagnie !

— Il faut que vous dansiez tout à cette heure un ballet au son de nos lyres.

— Quels personnages représenterons-nous ? dit Frémonde.

— Que monsieur, qui a déjà ma soutane, représente le principal de céans, répondit Hortensius, et que vous et tout le reste de la compagnie, prenant les robes de chambre de mes enfants, fassiez les personnages des écoliers. Tenez, monsieur le principal, prenez ces verges qui sont attachées à ma natte, vous en fouetterez les compagnons à la cadence.

La troupe, étant sortie de sa chambre, pour s’aller déguiser en une autre proche, considéra qu’il était fort tard, et se délibéra de s’en aller sans lui dire adieu, le laissant racler tout son saoul. J’allai querir les manteaux des hommes et les écharpes des femmes dessus son lit, lui faisant accroire qu’ils s’en voulaient servir pour se mieux déguiser, et, leur ayant tout apporté, je les fis sortir par la porte de derrière, dont le cuistre, qui était allé autre part, m’avait laissé les clefs ; puis je m’en retournai en mon étude, que je tins fermée, comme si je n’en eusse bougé de tout le soir.

Le principal faisait alors la ronde dans la cour avec une lanterne de voleur pour voir si tout le monde était retiré ; et passant par devant notre logement, il entendit la viole et la vielle qui jouaient toujours : il ne se pouvait imaginer qui faisait cette musique, qui était la plus discordante du monde, car les deux instruments n’é-